La Revue Française de Psychanalyse

86-1 Résumés des articles

86-1 Résumés des articles

THÈME : PRÉCOCITÉ

Marilia Aisenstein – Précocité, prématurité du moi. De la qualité des sublimations

RÉSUMÉ – À partir de la notion de précocité et de la « prématurité du moi » décrite par Michel Fain, l’auteur s’interroge sur les destins et la valeur fonctionnelle de la sublimation en relation avec la précocité/prématurité. Se fondant sur les travaux de Michel Fain, Benno Rosenberg et André Green, elle propose d’examiner la qualité de cette dernière et pose l’hypothèse d’un « négatif de la sublimation ». Résultant d’une désintrication pulsionnelle qui libère la pulsion de mort, ce « négatif de la sublimation » pourrait porter électivement la destructivité engendrée envers l’élément humain. Ceci induirait un pervertissement de certaines sublimations artistiques ou idéologiques qui dès lors iraient à l’encontre de l’idée freudienne, défendue en 1927, d’un Surmoi résultat d’une dialectique entre culturel et intrapsychique. En 1929, Freud décrit un « processus de civilisation » impliquant le sacrifice des satisfactions pulsionnelles au profit « d’une grande communauté humaine ».

MOTS-CLÉS – prématuration, prématurité du moi, sublimation, desubjectivation, négatif.

Dominique Scarfone – Entre précoce et prématuré, l’originaire. Quelques propositions

RÉSUMÉ – L’auteur explore, en quarante-cinq brèves propositions, la proximité et la différence entre « précoce » et « prématuré », en y insérant la question de l’originaire et de l’après-coup. Il est proposé, entre autres, que le précoce relève de l’observation empirique en termes de développement tandis que le prématuré renvoie d’abord au constat de la situation particulière du nouveau-né à la prématurité statutaire. Situation dans laquelle il importe de tenir compte de l’observateur qui en fait le constat, de sorte que l’Hilflösigkeit chez l’humain concerne une relation et donc le nouveau-né, mais aussi l’adulte qui en a soin. Entre les notions de précoce et de prématuré s’insère la notion winnicottienne de profond, qui invoque une complexité psychique redevable de l’après-coup, même si Winnicott ne s’y réfère pas nommément. Objet d’analyse, le profond renvoie à l’originaire comme temps actuel, c’est-à-dire ni précoce ni prématuré, sorte de souche temporelle dont le précoce et le prématuré se présentent comme des cristallisations.

MOTS-CLÉS – précoce, prématuré, infantile, originaire.

Bernard Golse – La précocité, vestige ou destin de l’originaire ?

RÉSUMÉ – Après quelques rappels sur le concept d’originaire, trois destins possibles de cet originaire (en tant que matériau-socle, en tant que matériau réactivable et en tant que matériau-processus) se trouvent illustrés par différents exemples développementaux. L’auteur aborde ensuite la dialectique qui existe entre le précoce et le profond et qui a été soulignée par Winnicott à propos de l’observation directe des bébés et des possibles conflits entre observateurs et analystes. Pour Winnicott, le profond qui s’analyse renvoie au remaniement fantasmatique du précoce qui s’observe. Le précoce s’inscrit dans le développement, le profond dans l’après-coup. La précocité intellectuelle qui suppose un rapport particulier aux objets épistémiques (rapport non réductible à une simple accélération des processus primaires et secondaires) peut être pensée soit comme un vestige, soit comme un destin d’un précoce non remanié et en lien encore énigmatique avec les processus originaires du fonctionnement psychique.

MOTS-CLÉS – après-coup, destins de l’originaire, originaire, précoce, précocité, profond.

Emmanuelle Chervet – L’aiguillon douloureux de la précocité

RÉSUMÉ – L’auteur propose un retour sur la notion de masochisme dans l’œuvre freudienne et dans celle des psychosomaticiens. La différenciation entre masochisme érogène primaire et masochisme érotique ouvrant au fantasme par le double retournement pulsionnel permet un repérage transférentiel plus précis. C’est ainsi que prend sens la description des défenses anti-traumatiques actives et de la prématurité du moi, proches de ce qu’on décrit actuellement en termes de précocité. La polarité activité-passivité y disparaît au profit de l’activité. Il s’agit d’une conjoncture qui interdit la régression et l’investissement d’un pôle hallucinatoire par la réexcitation sans fin d’un accrochage aux perceptions nociceptives. La clinique d’un enfant « précoce » illustre la participation parentale à cette prématuration, et quelques modes possibles de son élaboration. L’accès au masochisme moral permet une issue du côté de la douleur morale, et la haine une issue agie qui ouvre cependant à une différenciation et à une séparation.

MOTS-CLÉS – masochisme érogène, défense anti-traumatique, prématurité du moi, passivité, consultation thérapeutique.

Élisabeth Cialdella-Ravet – De l’enfant du siècle des Lumières à l’enfant des limbes de Winnicott

RÉSUMÉ – L’enfant précoce est à la mode aujourd’hui et le récit biographique de l’Infant de Parme nous montre qu’il l’était déjà au XVIIIe siècle. La découverte de la sexualité infantile dans Les trois essais de Freud a bouleversé la compréhension de la précocité intellectuelle. Un cas clinique nous permet de montrer que la précocité intellectuelle est liée à la précocité sexuelle et à la nostalgie des objets primaires. La séduction ou l’absence de la mère entraînent un emballement des processus psychiques innés. La disparition de l’hallucination primitive pour l’épreuve de réalité est alors mise en échec. Le processus de la pulsion de mort met en branle en s’exprimant par des clivages du moi entraînant une hyperintellectualisation de l’enfant. La pensée de Winnicott a permis de quitter la perspective métapsychologique classique en montrant qu’une déformation du regard sur son enfant entraîne une distorsion du moi chez ce dernier.

MOTS-CLÉS – précocité, sexualité infantile, Infant de Parme, séduction maternelle, Winnicott.

Mario De Vincenzo – Luc ou les ruses de l’intellect

RÉSUMÉ – L’auteur analyse les différents niveaux de la demande de consultation d’un enfant présentant des signes de précocité pour mettre en évidence la profonde intrication entre l’organisation psychopathologique du jeune patient, son fonctionnement cognitif et les fantasmes parentaux. L’analyse des dynamiques psychiques et de la portée défensive de l’intellect chez l’enfant permettra de comprendre comment l’usage contre-phobique de l’activité mentale peut solliciter des défenses de type maniaques visant à dénier le manque et la dépendance à l’objet. La prise en compte de l’intolérance à la frustration et du besoin de maîtrise à travers l’intellect nous aidera à comprendre comment cette trajectoire subjective permet à l’enfant de créer une forme d’auto-contenance en essayant de dénier la dépendance et les besoins qui relèvent de l’infantile.

MOTS-CLÉS – précocité, intellect, toute-puissance, défenses maniaques, infantile, consultation psychanalytique, maîtrise.

Michael Chocron – Adolescents précoces : clivage et numérique pour abriter l’espace transitionnel

RESUMÉ L’adolescence des sujets précoces intellectuellement donne à voir une utilisation spécifique du numérique qui a pour but de créer une distance dans la relation avec les figures parentales. Cette utilisation de l’objet numérique, donnant souvent l’impression aux parents d’être démunis, a valeur de limite. Elle peut se lire comme une réaffirmation d’un processus plus ancien, en lien avec l’activation précoce du moi, amenant à restriction de l’accès des parents à l’espace transitionnel. Celle-ci intervient dans le cadre de relation avec les parents que l’enfant peut vivre comme envahissante. Au travers d’un cas clinique d’adolescent reconnu précoce (avec une échelle d’intelligence), nous verrons comment cette limite, qui implique une mise à distance des objets également présente dans le transfert, a des effets sur l’intelligibilité du fonctionnement psychique de l’adolescent. Cela amène à interroger comment le mécanisme d’intellectualisation s’empare du numérique et plus particulièrement le jeu vidéo comme lieu de réaffirmation de cette limite.

MOTS-CLÉSadolescence, adolescent précoce, jeu vidéo, limite, traitement psychanalytique, clivage.

Claire Blanchet – L’hypermaturité intellectuelle à l’épreuve du pubertaire et du processus

RÉSUMÉ – L’hypermaturité intellectuelle, en tant qu’elle prend ses racines dans le sexuel, est interrogée dans sa constitution, ses fonctions et ses conséquences. Elle est envisagée après Ferenczi comme la face visible d’un auto-clivage narcissique précoce qui se forme en réaction à la séduction du sexuel de l’adulte et ayant pour conséquence d’entraver le développement de la sexualité infantile. Partant du travail clinique avec un adolescent, les auteurs montrent comment, une fois créées les conditions favorables à l’émergence du transfert négatif, à la mise en jeu du processus pubertaire et à l’intensification du transfert, se produit le démontage progressif de l’hypermaturité intellectuelle laissant apparaître, avec violence, la partie enfouie du clivage. La présence d’un environnement thérapeutique présent et non empiétant permet la constitution d’assises narcissiques nouvelles, sur lesquelles le patient peut se confronter au sexuel et à l’élaboration de l’Œdipe sans recourir à la défense par l’hypermaturité.

MOTS-CLÉS – Pubertaire, hypermaturité intellectuelle, nourrisson savant, narcissisme, clivage narcissique.

Sarah Bydlowski – Une attention pour le précoce dans la rencontre psychanalytique avec un enfant

RESUMÉ – La figure de l’enfant précoce est une expression actuellement fort répandue. Elle interroge l’accueil de la temporalité propre du développement, de la place du corps pulsionnel de l’enfant, de l’infantile en soi et de ses manifestations inconscientes. Par le récit des premières consultations d’un très jeune enfant en présence de ses parents, nous illustrons l’idée qu’une précocité du fonctionnement de l’enfant pourrait conduire trop rapidement à une indication de psychothérapie, au détriment de la compréhension suffisante des échanges inconscients et conscients entre l’enfant et ses parents, et de leur cheminement thérapeutique nécessaire. Prendre le temps suffisant de l’élaboration en consultation avant toute proposition de séparation pour un traitement individuel se révèle indispensable, en regard tant du développement de l’enfant en pleine construction psychique que de l’infantile et des blessures narcissiques parentales.

MOTS-CLÉS – prématurité du moi, infantile, liens parents-enfant, consultation thérapeutique.

DOSSIER : LA PSYCHOTHÉRAPIE PSYCHANALYTIQUE CORPORELLE

Monique Dechaud-Ferbus, Christine Pelissier – Origines et évolution de la méthode de la psychothérapie psychanalytique corporelle (PPC)

RESUMÉ – La PPC est une pratique psychanalytique utilisant plus particulièrement la perception et la sensorimotricité comme médiation corporelle dans la relation entre le patient et l’analyste quand le langage verbal échoue dans sa fonction médiatrice. L’historique de la méthode de Psychothérapie Psychanalytique Corporelle et son évolution nous a permis de montrer avec plusieurs points de vue de collègues, l’intérêt de l’utilisation des paramètres de l’organisation somatopsychique pour travailler à partir de l’originaire avec des patients présentant des pathologies réfractaires à la cure type .Quelle que soit l’organisation psychique des patients, l’originaire étant actif toute la vie nous pouvons constater l’intérêt pour tout un chacun du travail dans ces régions archaïques de notre fonctionnement. Les recherches se poursuivent aujourd’hui dans le cadre de l’Association pour l’Enseignement de la Psychothérapie Psychanalytique Corporelle (AEPPC).

MOTS-CLÉS – AEPPC, Moi corporel, toucher, regard, divan, médiation.

Annette Thomé Renault – Réintrication pulsionnelle masochique par la PPC dans les états de désorganisation psychosomatique

RÉSUMÉ – L’annonce d’une maladie inéluctablement mortelle constitue pour Yohan un traumatisme actuel réactivant les traces d’un trauma précoce vécu sans avoir été mentalisé et provoquant un effondrement dans un état de profonde détresse. Le collapsus psychique et le déferlement d’excitations dans le corps vont être rapidement résolus par la PPC et progressivement les capacités de liaison masochique vont se restaurer dans un plaisir de fonctionnement mental partagé.

MOTS-CLÉS – tact, masochisme érogène, liaison, transfert de base.

Walter Ribour – Le pare-excitations sur le divan de la psychothérapie psychanalytique corporelle

RÉSUMÉ – Comment le pare-excitations régulant le passage des excitations entre le dehors et le dedans trouve dans la Psychothérapie Psychanalytique Corporelle un cadre favorisant son renforcement ? Par l’appui sur le perceptif et la mise en éveil de la fonction du toucher à distance, le patient au pare-excitations défaillant est porté et contenu par le divan, par « l’objet-analyste » en personne et par le tact de ce dernier, favorisant ainsi le traitement de l’excitation, son évacuation et sa liaison.

MOTS-CLÉS – pare-excitations, peau, toucher, tact, regard.

Bertrand Caillierez – La dimension transféro-contre-transférentielle des échanges de regard en PPC et son élaboration

RÉSUMÉ – Dans cet article, à partir d’un cas clinique suivi en PPC, nous avons mis en perspective l’importance du regard et de la médiation corporelle au sein de la relation transféro-contre-transférentielle. La progression des séances nous a amenés à repérer dans le processus un mouvement où quelque chose s’est noué de manière invasive puis dans un second temps dénoué grâce au rétablissement d’une compréhension bienveillante de la part du psychanalyste. Ces deux événements psychiques et interrelationnels ont permis d’appréhender à travers l’instabilité du fonctionnement mental du patient la présence de bases archaïques insuffisamment construites de son moi. Le travail avec le patient a favorisé un renforcement du contenant psychique. Les traces mnémoniques d’une histoire traumatique de la petite enfance du patient seront traduites et exprimables par la parole sans que son appareil psychique ne risque de voler en éclats. L’analyste peut parvenir comme ici dans le contre-transfert à un hallucinatoire permettant la reprise des traumas et leur appropriation par le patient.

MOTS-CLÉS – regard, moi corporel, traces mnémoniques.

Stéphanie Azoulay – Ça se balade… Ça ballotte… Ça pique… Le travail de PPC quand le corps est délirant

RÉSUMÉ – Dans le cadre de la cure d’une patiente aux symptômes psychotiques lourds et invalidants, la psychothérapie psychanalytique corporelle facilite l’installation difficile de la relation thérapeutique. La patiente, dont le corps délirant manifeste une excitation qui ne peut-être canalisée par un pare-excitations défaillant, n’arrive pas à élaborer ses pensées. Elle accède progressivement à ses souvenirs par l’évocation de ses ressentis corporels. La prise en compte par sa thérapeute du récit délirant de ses sensations corporelles permet d’enrichir le discours de la patiente enfermée dans une plainte peu élaborée. Des rêves apparaissent entre les séances après plusieurs années de thérapies. En partageant ce vécu corporel particulier, des représentations et l’évocation de souvenirs traumatiques lui deviennent possible, produisant des moments de soulagement et permettant à Joséphine de s’intéresser à son fonctionnement psychique malgré des symptômes psychotiques persistants.

MOTS-CLÉS – psychothérapie psychanalytique corporelle, délire corporel, pare-excitation, relation thérapeutique négative.

Sylvie Reignier – Les avancées de la recherche sur le Moi corporel : leur rapport au travail corporel en PPC

RÉSUMÉ – Les apports de G. Haag sur la construction du Moi corporel soutiennent les visées de la PPC : rester dans une préoccupation du corps du patient, tant que ce dernier n’a pu développer une attention et une symbolisation suffisante de ses éprouvés sensoriels et toniques pour leur faire place dans sa vie d’âme. Celle-ci peut pourtant être déjà, dans bien des cas, très développée. Une des ambitions de la PPC est de permettre que la personne secourable des premiers temps de la vie puisse advenir, comme objet interne structurant, sur une scène corporo-psychique plus tolérante à la possibilité de la détresse ; tout aussi important est l’étayage d’un tiers paternel protecteur sur un objet d’arrière-plan solide. C’est par la voie du corps que peuvent être retravaillés, et espérons-le transformés, les traces des abandons, des attaques d’un surmoi primitif cruel, aussi bien que les retraits du patient dans des zones clivées lui interdisant l’intégration de mouvements objectaux primitifs.

MOTS-CLÉS – autisme, moi corporel, sensorialité, regard, agrippement.

Brigitte Pacquement – Le courant contre-transférentiel et son implication dans la séance

RÉSUMÉ – C’est grâce au travail corporel sur la perception et les sensations que la patiente a pu faire des liens avec son histoire et retrouver des traces mnémoniques figées, gelées, enkystées dans sa vie psychique. La sensorialité souvent vue comme anti-pensée favorise ici dans le travail de PPC l’appropriation subjective et permet la reprise du mouvement de vie. Comment une patiente a pu bénéficier du contre-transfert de son analyste pour retrouver un sentiment d’existence.

MOTS-CLÉS – PPC, contre-transfert, sentiment d’existence.

RUBRIQUES

Technique psychanalytique

Leopoldo Bleger – Qu’est-ce donc que le cadre ?

RÉSUMÉ – Depuis la fin des années 90, le cadre est devenu un thème de plus en plus présent dans le débat et dans la littérature psychanalytiques. Auparavant, le mot en était absent ou utilisé par quelques psychanalystes comme un simple terme sans véritable conceptualisation. Le premier à en faire un concept a été D.W. Winnicott dans les années 50. Il faudra attendre la fin des années 60 pour que le concept soit traité en tant que tel. Ce fut le cas d’abord en Argentine par José Bleger et d’autres auteurs argentins. À partir des années 70, le concept commence à prendre une place de plus en plus importante en France, grâce surtout à Jean-Luc Donnet et André Green. Ce texte se limite aux premiers temps du surgissement du concept de cadre. Pourquoi la promotion de ce concept ? Pourquoi est-il devenu omniprésent dans les échanges entre analystes ? S’agit-il d’un approfondissement des problèmes de la cure psychanalytique, ou est-il au service de profonds changements de la technique ?

MOTS-CLÉS – cadre psychanalytique, processus, cas-limites, conception de la cure.

Cadres et théories des pratiques

Adrien Blanc, Jérôme Boutinaud – Élaboration groupale du contre-transfert au psychodrame psychanalytique individuel

RÉSUMÉ – Un des vecteurs thérapeutiques du psychodrame individuel réside dans la rencontre de plusieurs cliniciens au sein d’une expérience clinique partagée en groupe avec un unique patient. Radicalement différente des expériences de la cure individuelle, cette configuration pourrait apparaître comme portant le germe d’une possible confusion de par notamment le nombre de co-thérapeutes présents. Toutefois, si l’on considère qu’une élaboration groupale puisse s’effectuer autour de la dynamique transféro-contre-transférentielle induite par le patient accueilli, cette « cacophonie » potentielle peut déboucher sur une élaboration psychique qui trouvera son expression la plus aboutie au cœur même du jeu. Ouvrant sur une réflexion articulée autant par rapport au vécu clinique expérimenté dans la séance qu’aux élaborations qui l’accompagnent en périphérie, cet article montre comment le groupe vient à métaboliser les éléments transférentiels qui s’y déploient, modelant par la suite l’engagement de ses participants faisant une place aux contenus non représentés.

MOTS-CLÉS – élaboration groupale, contre-transfert groupal, contenus non symbolisés, symbolisation, processus thérapeutique, espace transitionnel .

Psychanalyse et épistémologie

Albert Blanquer-Laguarta – Sur les épaules de Marty. Le principe évolutionniste

RÉSUMÉ – Cet article est une recherche sur les bases évolutionnistes de l’œuvre de Pierre Marty. André Green l’a à juste titre questionné sur l’absence de références à l’origine de son œuvre. Pour Marty, l’évolutionnisme est un principe évident de sa vision de la psychosomatique transmis en premier par son père, Abel Marty. Après un rappel des théories de l’évolution, l’article passe en revue ses influences évolutionnistes, confirmées ou probables, et décrit comment sa pensée évolutionniste a progressé : sa thèse savante, sa prise de conscience des résistances face à ce principe, la description des chaînes évolutives, les fixations intra-utérines, l’élargissement des lois de l’inconscient grâce aux principes d’automation et programmation et son rapprochement du théoricien des sciences Henri Atlan. Dans son ouvrage de 1990, La psychosomatique de l’adulte, Marty signale les limites de ses découvertes au sujet du « choix » de pathologie et d’organe, objet d’une possible recherche évolutionniste.

MOTS-CLÉS – Pierre Marty, évolutionnisme, psychosomatique, monisme, Henri Atlan, André Green, choix d’organe.

Psychanalyse et littérature

Philippe Jaeger – Quelques figures littéraires de la migraine

RÉSUMÉ – Nous avons découvert que la migraine était présentée, dans l’après-coup de la création littéraire, d’une manière riche et précise par les auteurs étudiés tous migraineux, comme G. de Maupassant, T. Ben Jelloun, P.M. Moller, Boulgakov et P. Fleutiaux. Leur description, particulièrement évocatrice du contexte dans lequel survient la crise, suggère souvent l’irruption imprévue d’un facteur de l’environnement désorganisant momentanément la vie psychique, conséquence d’une mise en danger du narcissisme primaire du sujet, là où le sujet fait partie de l’environnement et l’environnement du sujet. Il en résulte parfois la survenue d’angoisses de forte intensité. Le mécanisme psychique de la répression, qui désarticule affect et représentation précède parfois la crise. La migraine, transformée et élaborée par l’acte de création littéraire, permet de surmonter la blessure narcissique infligée. Il en résulte une restauration de l’espace transitionnel de jeu et de symbolisation momentanément détruit, l’auteur parvenant à communiquer, grâce à l’écriture, avec un objet intérieur et extérieur (le lecteur) son expérience émotionnelle de la crise, jadis non traduite en langage verbal.

MOTS-CLÉS – migraine, environnement, espace transitionnel, paradoxe, narcissisme primaire, création.